Depuis le début de mon Tour du Monde il était convenu que je retrouve mon fils Andric, 20 ans, à Jakarta le 17 décembre. Durant les 3 mois de mon périple qui ont précédés ce rendez-vous, j'ai souvent ressenti de petits accès d'inquiétude concernant ces retrouvailles : je craignais qu'un imprévu ne vienne démolir nos projets alors que ce voyage en Papaousie occidentale me tient vraiment à coeur. Un séjour dans ce pays serait -paraît-il- un peu risqué pour les étrangers à cause de certaines tensions entre la Papouasie Indonésienne et la Papouasie-Nouvelle-Guinée. C'est pour cette raison que mon fils a eu la gentillesse d'accepter me rejoindre pour cette partie de mon grand voyage.
J'avais raison d'avoir quelques craintes puisque j'apprends soudain par un sms de mon mari qu'Andric avait fait plusieurs tonneaux avec son 4x4 sur les routes montagneuses de Haute-Savoie la veille de son départ. Comme c'était de nuit, il n'a pas pu retrouver son téléphone portable ni ses lunettes...seulement ses papiers et ses billets d'avion...Ouf ! Il n'a que quelques contusions et a refusé d'être hospitalisé du fait qu'il prenait l'avion le lendemain de la nuit de l'accident.
Quelques heures après, on me confirmait qu'il avait bien embarqué sur le vol Paris-Doha (Qatar) et prenait un second vol de Doha à Jakarta. D'après nos horaires je devais arriver à l'aéroport de Jakarta 45 minutes avant lui. Tout est bien calculé, mais...j'ai vraiment hâte de le voir à mes côtés. Mon fils est un garçon assez imprévisible à qui il arrive toutes sortes d'aventures...La preuve hier soir avec son stupide accident dû à la fatigue : il venait de faire ses adieux à ses amis...
J'atterri à l'heure à Jakarta. Le temps de récupérer mes bagages et de me soumettre aux formalités douanières, l'heure d'atterrissage de l'avion d'Andric est arrivée. J'entends l'annonce de son vol. Je me rends aux arrivées et j'attends. Toujours la même atmosphère dans ces aéroports : les gens arrivent, plus ou moins fatigués, traînant ou portant leurs bagages tout en cherchant des yeux queque chose ou quelqu'un...ça défile, ça défile...mon coeur bat de plus en plus fort...Je me raisonne : de toutes façons, il est toujours le dernier...
Au bout d'un moment, je suis bien obligée de me rendre à l'évidence : Andric n'est pas parmi les passagers du vol Doha-Jakarta qui vient d'atterrir. je suis très déçue et surtout, j'ai peur.
Puisque ma famille m'a confirmé qu'il avait bien décollé de Paris il ne pouvait qu'avoir raté celui de Doha-Jakarta. J'ai peur parce qu'il vient de vivre un accident assez grave où il aurait pu avoir un choc à la tête dont les consequence seraient une perte de méméoire ou pire...Je déploie des force surhumaines pour rester calme mais...échec total : j'angoisse.
Après avoir couru à droite et à gauche, accosté, réclamé, demandé "are coming from Doha ?" à chaque d'arrivée d'avion...j'ai fini par me faire repérer du personnel de l'aéroport et des chauffeurs de taxis toujours à l'affut d'éventuels clients.
Après 2 ou 3 heures de recherches ou d'attente, je me décide enfin à m'informer au bureau principal de l'aéroport où un employé m'a conduite. Le Monsieur regarde son PC, grâce au billet d'Andric que j'avais eu la bonne idée de scanner et imprimer avant de partir (heureusement car, comment aurais-je pu me faire entendre sans cela ?) Je consulte la liste sur l'écran avec l'employé : Andric est bien dans la liste des passagers Paris-Doha mais il N'EST PAS dans celle de Doha-Jakarta, donc il est impossible qu'il ai pris cet avion. Nous consultons les listes des autres départs : rien du tout !
Je suis effondrée ! Qu'est-il arrivé à mon fils ? Il est difficile de rater son avion lorsqu'on est en transit : il n'y a pas à faire enregistrer les bagages et l'on est la plupart du temps, directement orienté vers la salle d'attente de l'avion suivant, sauf s'il y a une très longue attente, ce qui ne semblait pas être le cas d'Andric.
Cette fois-ci je n'ai plus d'espoir : il va bien me falloir renoncer à ce "Noël chez les Papous", les billets d'avion Jakarta-Jayapura non remboursables seront perdus...
Je suis surtout angoissée pour mon fils : Que lui est-il arrivé ? A-t-il perdu la mémoire suite à son choc ? Est-il hospitalisé à Doha suite à une commotion cérébrale ou autre ? les pompiers de Haute-Savoie l'avaient prévenu que les conséquences de son accident pouvaient se ressentir plus tard et qu'il aurait bien besoin d'un contrôle hospitalier. Il avait refusé en leur signant une décharge...
Devant mon désarroi, l'employé me suggère d'aller directement au "Qatar Airways'Office aux étages supérieurs pour qu'ils me disent - peut-être - ce qu'il est advenu de mon fils et de ses bagages puisqu'il était en transit et n'était normalement pas autorisé à sortir de l'aéroport...
Mais...je connais Andric et je sais qu'une interdiction ne le gêne pas trop...voilà le problème et c'est ce qui m'inquiète dans ce pays musulman où les étrangers n'ont pas intéret à faire un faux-pas. : mon fils serait capable d'avoir dragué la femme ou la fille d'un cheikh !
J'arrive devant les bureaux qui sont tous fermés car il est 18 h. On me dit de revenir à 21 h heure de réouverture. Des bureaux ouverts à 21 h ? j'ai des doutes...Je redescends dans le Hall principal, prête à attendre 3 h de plus...Il y a déjà 4 h que j'angoisse.
Un chauffeur qui a remarqué mes va-et-vient m'aborde pour me proposer un hôtel. Je lui explique mon problème et il me dit qu'il y a un hôtel à une trentaine de km de l'aéroport, pas cher : 25 $ avec petit-déjeuner et Aller-retour à l'aéroport inclus dans le prix. Il me suggère de m'y emmener pour m'installer et prendre une douche, et me ramener à l'aéroport pour 21 h.
J'accepte et nous partons. Entre temps, j'avais envoyé un sms à la famille en demandant s'ils avaient des nouvells d'Andric et laissé mon téléphone allumé dans l'attente de leur réponse.
Et voilà qu'au moment d'arriver à l'hôtel mon appareil sonne : c'est un message vocal. Je décroche : c'est la voix d'Andric !!! Je pensais qu'il m'appelais du Qatar, mais NON !!! Il est à JAKARTA !!! J'ai juste le temps de lui donner rendez-vous aux bagages que la communication est coupée ! Juste pris le temps de déposer mes affaires dans NOTRE future chambre et nous repartons direction l'aéroport. Il tente de me rappeler mais nous sommes coupés ! une autre fois : c'est tellement brouillé que je ne comprends rien ! A-t-il compris que j'avais déjà quitté l'aéroport et qu'il me fallait le temps de revenir ? Mon fils n'est pas patient : je crains qu'il n'aille n'importe où pour dormir...et de toutes façons, j'ai tellement angoissé que maintenant le moindre nouvel imprévu me terrorise !
Nous arrivons au lieu de rendez-vous : pas d'Andric ! mon chauffeur cherche avec moi. Il n'arrête pas de me dire : "don't worry ! don't worry !" devant mon inquiètude. Si près du but ! On se sent vite perdu et vulnérable dans une langue et un pays étrangers. Mon chauffeur est gentil : il cherche avec moi. Nous allons dedans, dehors d'un bout à l'autre de l'aéroport, il y a encore plus de monde que dans l'après-midi.
Soudain, un homme nous aborde :"Are-you looking for your son ?" YES ! YES ! (cherchez-vous votre fils ? OUI ! OUI !) et il nous entraîne à sa suite en marchant à grands pas. J'ai peur d'une fausse joie; je lui prédise : 20 ans ! "yes ! yes !" Nous sortons de l'aéroport et, tout fier, il tend son bras vers un banc où sont assis plusieurs jeunes. Il fait sombre, je distingue mal les silhouettes. Il les appelle...et je vois enfin mon fils se lever, tout sourire...c'est trop MERVEILLEUX ! je remercie chaleureusement le monsieur, heureux et fier de m'avoir rendu service : il avait remarqué mes allées-venues et mon angoisse durant ces 5 longues heures et, ayant fait la relation entre Andric et moi il l'avait abordé lui-même lorsqu'il l'avait vu à son tour rechercher quelqu'un.
Notre chauffeur de taxi nous ramène à l'hôtel. Il est 22 h environ. Lui aussi se réjouit de mon soulagement. Ces Indonésiens sont vraiment gentils, serviables et désinterressés. j'en ferai souvent l'expérience par la suite.
Nous avons supposé le fin mot de l'histoire : A Doha, on avait mis mon fils dans un autre avion qui est arrivé 5 h plus tard, apparemment sans le moidre signalement puisqu'il n'était inscrit sur aucune liste de départ. C'est quand même fort ! je ne félicite pas Qatar Airways mais bon. Je suis tellement soulagée que j'ai l'impression d'avoir été remise à neuf !
A SUIVRE...